Club des collectionneurs en Arts Visuels de Québec

Un tableau du parlement en flammes…au parlement

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PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL, ERICK LABBÉ

Le tableau L’incendie du parlement, de Martin Bureau, sera exposé à l’Assemblée nationale dès mercredi.

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Josianne Desloges:Le Soleil

Le peintre Martin Bureau a réalisé L’incendie du parlement lors de l’événement Le ravissement du désordre, présenté au printemps 2013 dans l’édifice du futur Diamant, à la place D’Youville. La toile de 12 pieds sur 10 pieds montre le parlement de Québec en feu. «C’est un constat assez cynique sur l’état de la démocratie, une vision au futur antérieur», indiquait alors l’artiste.

Marc Bellemare raconte qu’il ne lui a pas fallu plus de dix minutes pour décider d’acheter le tableau. «Je trouve que c’est une belle métaphore et qu’il n’y a pas assez d’oeuvres politiques au Québec. Nos artistes sont trop tranquilles, alors qu’il y aurait plein de sujets intéressants avec toute la corruption et la collusion qu’il y a», explique l’ex-ministre libéral. «Ça répondait aussi à mon parcours [politique]. À tout ce qui s’est produit dans la commission Bastarache, une farce monumentale.»

Martin Bureau avait le projet d’offrir son oeuvre au Parlement. Convaincu d’essuyer un refus, il comptait utiliser la réponse de l’institution pour rédiger un communiqué de presse qui appuierait la vision présentée dans le tableau. «Je voulais narguer, mais dans ma tête, c’était sûr qu’ils allaient refuser. Ça faisait même partie du plan», souligne-t-il.

À l’automne 2013, Marc Bellemare accepte d’aider Martin Bureau dans ses démarches et contacte Jacques Chagnon, le président de l’Assemblée nationale, pour lui suggérer de prendre le tableau. «Je ne lui ai pas dit que je l’avais acheté», précise toutefois M. Bellemare. «Je trouvais ça bien de faire entrer un jeune artiste en arts actuels au parlement. Le fait que je suis le donateur, je trouvais ça technique, je ne trouvais pas ça important.»

Martin Bureau a toutefois attendu que le contrat de donation soit rédigé, plusieurs mois plus tard, pour changer son nom pour celui de Bellemare sur les papiers officiels. «Si ça revirait de bord à ce moment-là, ça aurait été pour des raisons politiques, et on aurait toutes les preuves pour prouver que ce n’est pas à cause du tableau», indique Bellemare. «Moi, je trouvais ça encore plus porteur qu’un ancien parlementaire, ex-ministre de la Justice, qui a déclenché la commission Bastarache, donne ce tableau», souligne Bureau.

Réflexion démocratique

À la surprise du donateur et de l’artiste, le tableau est accepté et des travaux d’aménagement sont faits pour accueillir l’oeuvre sur un mur du parlement. Martin Bureau collabore étroitement avec les fonctionnaires pour tout préparer. «On est tombés sur une équipe qui avait de la tête et qui était audacieuse. Ils côtoient le mensonge, les rhétoriques douteuses et sont dans la même bâtisse que les élus. S’ils peuvent eux-mêmes participer à mettre de l’autocritique dans la bâtisse, je crois que ça va leur faire du bien. Ce qui était une intention de narguer s’est transformé en quelque chose de très positif», constate l’artiste.

Du côté du Parlement, on indique que «l’oeuvre se veut un hommage, mais aussi une réflexion sur la démocratie et sa précarité, ce qui s’inscrit directement dans la mission de l’Assemblée nationale», en ajoutant qu’elle «souligne l’importance de soutenir les jeunes artistes contemporains québécois».

L’art actuel occupe en effet peu de place dans la collection du parlement, qui compte surtout des tableaux patrimoniaux et historiques. Les acquisitions des oeuvres, sous la responsabilité du secrétaire général en concertation avec le président de l’Assemblée nationale, s’appuient d’ailleurs sur la politique de gestion de la collection d’objets patrimoniaux.

«Toute acquisition constitue un ajout significatif à la conservation et à l’interprétation de l’histoire politique du Québec et permet sa mise en valeur», nous a-t-on indiqué lorsque nous avons demandé quels éléments étaient pris en compte pour accepter ou refuser une oeuvre.

L’oeuvre sera inaugurée en pleine période de vacances, après des démarches de près d’un an et plusieurs reports dus à la campagne électorale, aux élections, et à la session parlementaire du printemps. Au Parlement, on nous assure que la date a été retenue en fonction des disponibilités du président de l’Assemblée nationale et des autres personnes en lien avec le projet.

Martin Bureau, peintre et documentariste, aborde les sujets sociopolitiques dans ses oeuvres et aime alimenter les débats. Pendant les célébrations du 400e anniversaire de Québec, la fonderie Bibby Ste-Croix avait refusé de couler son oeuvre Hommage à Sa gracieuse Majesté, représentant la reine d’Angleterre avec un panache d’orignal.

 

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